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Rencontre avec un avocat. Compte rendu des classes de 4è1 et 4è2

Les élèves de 4°1 et 4°2 ont travaillé sur le thème des migrants avec Mme HOSTIER et Mme PERROS dans le cadre d’un travail interdisciplinaire durant lequel, Maître Pigeon, une avocate spécialisée dans le droit des migrants est intervenue le 2 mai 2018 au CDI. Nous avions préparé quelques questions sur lesquelles nous avons débattu. En voici un compte-rendu:

Quelles sont les études nécessaires pour être avocat et combien de temps durent-elles ?

Pour être avocat il faut avoir le bac puis aller en faculté de droit pendant 4 ou 5 ans pour obtenir un master I ou II. Puis il faut passer un concours pour entrer en formation dans une école d’avocat durant 1 an. A la fin de cette année, les étudiants doivent obtenir le concours du CAPA pour valider leur capacité à être avocat. Une fois le CAPA obtenu, l’avocat s’inscrit à un barreau pour exercer son métier en France ou en Europe.

La défense des migrants est-elle une spécialité pour laquelle vous avez dû vous former ? Depuis combien de temps accompagnez-vous les demandeurs d’asile ?

La défense des migrants est une spécialité pour laquelle il faut se former grâce à une association d’avocats. Cela fait 15 ans que Me Pigeon accompagne les migrants dans leur demande d’asile. Ce sont des dossiers complexes avec un court délai de travail (de 24 à 48h) et c’est émotionnellement très éprouvant. C’est pour cela que l’avocate ne prend pas que des demandes d’asile et travaille sur beaucoup d’autres affaires.

Qui prend en charge les migrants à leur arrivée ? A quel moment intervenez-vous ? Qui vous paie ?

Les migrants ne sont pas pris en charge à leur arrivée même si des associations peuvent leur venir en aide. A partir de la date de leur entrée sur le territoire, ils ont 3 semaines pour se signaler à la préfecture ou à la police des frontières et déposer un dossier de demande d’asile, puis 4 mois pour entamer véritablement leur procédure de demande.

L’avocat intervient seulement après le rejet de l’OFPRA (Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides). Il guide tout d’abord les demandeurs d’asile pour constituer leur dossier d’appel qu’ils déposeront à la Cour Nationale du Droit d’Asile à Paris. Pour cela, il les aide à faire le récit de leur histoire en exposant les raisons pour lesquelles ils se jugent persécutés et en danger dans leur pays d’origine. Il les accompagne également pour réunir tous les documents qui prouvent la véracité de leurs propos. L’avocat les défend jusqu’au tribunal où il les représente.

L’avocate que nous avons rencontrée intervient dans des centres de rétention, à la fin de la procédure, quand toutes les autres demandes d’asile ont été refusées et que les migrants sont prêts à quitter le territoire. On compte une vingtaine de centres de rétention en France. Celui de Lyon se trouve dans un ancien hôtel à proximité de l’aéroport Saint-Exupéry. A ce moment, l’avocate aura 48h pour étudier le dossier de son « client » et le défendre une dernière fois (une prolongation de 28 jours est possible). En cas d’échec, il sera définitivement expulsé du pays.

Quelle est est la durée moyenne de la procédure ?

La durée moyenne de la procédure est de 120 jours.

Quels sont leurs droits durant la procédure de demande d’asile ?

Durant la procédure, les migrants ont le droit d’avoir un logement et peuvent être accueillis dans un centre d’hébergement. Malheureusement, cette procédure ne fonctionne pas toujours bien et la plupart des migrants vit à la rue. Les demandeurs d’asile ont le droit de demander une autorisation provisoire de travail qu’ils n’obtiennent qu’au bout d’un an. Pour les migrants sans papiers, c’est à dire ceux dont toutes les demandes ont été rejetées mais qui restent clandestinement en France, c’est plus compliqué : la loi leur interdit de travailler en situation irrégulière car c’est interdit d’avoir accès à un travail sans document titre ou carte donnant un lieu de résidence en France.

Une aide spécifique est-elle apportée aux mineurs isolés lors de leur arrivée en France ? Quels sont leurs droits ?

La Convention Internationale des Droits de l’Enfant oblige les états signataires à accueillir les migrants mineurs isolés. Le service d’aide sociale à l’enfance se doit (dès que le mineur arrive sur le territoire sans sa famille) de subvenir à ses besoins et à son éducation.

Une fois pris en charge, le mineur est scolarisé en école, collège ou lycée selon son âge, et bénéficie (au moins la première année) de cours en groupes restreints afin d’apprendre le Français.

Dès ses 18 ans, il devra faire une demande d’asile ou sera renvoyé dans son pays d’origine. S’il arrive jeune et passe plusieurs années en France avant sa majorité, ses chances d’obtenir la nationalité française à 18 ans sont plus nombreuses.

Quels sont les droits des réfugiés ? Sont-ils les mêmes que ceux d’un citoyen français?

Une fois reconnus, les réfugiés ont les mêmes droits qu’un citoyen français : le droit aux soins, le droit à l’éducation, le droit au travail… Par contre ils n’ont pas le droit de vote car, même s’ ils sont réfugiés en France, ils n’ont pas la nationalité française. Ils ont aussi des devoirs : ils doivent payer des impôts.

Attention ! Les réfugiés ont des droits que les demandeurs d’asile et encore plus les sans-papiers (migrants qui n’ont pas le doit d’être sur le territoire, ou demandeurs d’asile qui devraient être expulsés mais qui restent malgré tout sur le territoire) n’ont pas du tout.

Sur cette question lire l’article (très complet !) du monde.fr

http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2016/10/13/a-quoi-les-migrants-ont-ils-vraiment-droit-en-france_5012683_4355770.html

En cas d’échec, qu’advient-il des demandeurs d’asile ?

Les migrants n’ayant pas obtenu le droit d’asile sont renvoyés dans leur pays d’origine, on procède donc à l’éloignement forcé. En attendant leur départ, les demandeurs d’asile sont accueillis dans des centres de rétention qui sont utilisés pour retenir les étrangers auxquels on ne reconnaît pas les droits de séjourner sur le territoire français. 

Un certain nombre de déboutés du droit d’asile ne sont pas effectivement expulsés. La Cimade, un des grands services de soutien aux étrangers, a calculé qu’en moyenne 10 % des déboutés du droit d’asile sont renvoyés. Mais ce chiffre n’est qu’une estimation.

Quelle est la frontière entre le délit de solidarité et le délit de non assistance à personne en danger ? Est-ce légal d’héberger un demandeur d’asile ?

La frontière entre le délit de solidarité (qui n’existe pas aux yeux de la loi) et le délit de non-assistance à personne en danger est très fine. Le délit de non-assistance à personne en danger est compliqué à juger car dans notre quotidien il est fréquent de passer à côté d’une personne vivant dans la rue sans l’aider. De même pour le délit de solidarité qui peut être mal interprété par la justice devant des actes solidaires (ex : une personne aidant un migrant blessé et/ou malade à entrer en France sans le faire payer peut être jugé par la justice en tant que passeur). Ce qui est donc illégal c’est de faire payer ce « service » ; mais on a tout à fait le droit d’aider : donner de l’argent, de la nourriture, loger, proposer une douche, un accès au téléphone à internet etc. Un citoyen a le droit de faire, aux yeux de la loi, tout ce qui peut « préserver la santé et la dignité des personnes ».

Il est totalement légal d’héberger un demandeur d’asile. Cependant si la demande du droit de séjours n’a pas abouti, il est illégal pour un particulier d’héberger un demandeur d’asile qui devient aux yeux de l’Etat un clandestin, même si l’on peut aussi penser qu’il y a un devoir d’hospitalité.

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